Attentats parisiens de 2015 : rejet de toute responsabilité de l’État

A la suite de la vague d’attentats qui a touché la France le 13 novembre 2015, des victimes avait saisi la juridiction administrative parisienne aux fins de faire reconnaître une défaillance de l’État.

Par 3 décisions du 18 juillet 2018, le juge administratif rejette les requêtes des victimes des attentats.

Les victimes y visaient plusieurs niveaux de services de l’État.

Le premier grief était celui d’un “défaut de surveillance des auteurs des attentats“.

Était également allégué un “défaut de surveillance de la salle de spectacle du Bataclan“.

Finalement, les victimes se prévalaient d’un “défaut de coopération des services de renseignement“.

Toutefois, le juge administratif ne relève aucune faute lourde imputable aux forces armées et donc à l’État français;

Seule une faute de cette nature permettrait d’engager la responsabilité de la puissance publique.

Le défaut de surveillance des auteurs des attentats

Plusieurs des auteurs avaient été identifiés et faisaient l’objet de suivis judiciaires (contrôle judiciaire, confiscation de passeport, interdiction de sortie du territoire, mandats d’arrêt international) pour certains et de la part des services des renseignements pour d’autres (fichage S).

En outre, les attentats ont été préparés hors du territoire français, les terroristes n’étant arrivés que la veille des évènements.

A ceci s’ajoute qu’ils communiquent via messageries cryptées.

Les requérants ne démontrent pas que les services des renseignements étaient en possession “de renseignements permettant de prévenir la survenue des
attentats d’un 13 novembre 2015“.

S’ajoute que certains auteurs étaient inconnus des services de renseignement et circulaient sous de fausses identités via les itinéraires d’immigration massive de 2015 ; pour d’autres, les signalements d’homologues étrangers ne sont parvenus que le jour des attentats.

La circonstance de ce que les “difficultés particulières inhérentes à l’activité des services de renseignement” et notamment eu égard “aux moyens et aux connaissances limités dont disposaient alors ces services à la fois pour appréhender et prévenir de nouvelles formes d’attentat terroriste,  les éléments produits par les requérants ne permettent pas d’établir, dans le contexte d’absence de contrôle aux frontières intérieures de l’espace Schengen, que l’État aurait commis une faute lourde de nature à engager sa responsabilité consistant en un défaut de surveillance des individus susmentionnés à l’origine des attentats du
13 novembre 2015″.

Le défaut de surveillance de la salle de spectacle du Bataclan

Le juge administratif évoque un précédent non-lieu à la suite d’un signalement à la fin de années 2000 concernant un projet d’attentat visant cette salle de spectacle ; l’information préalable ne vaut pas faute, notamment parce que le Bataclan n’était pas nommément visé.

Aucun dispositif n’était exigible ; aucune faute lourde n’est à retenir.

Le défaut de coopération des services de renseignement

Les requérants se prévalent de l’absence de coopération en matière de terrorisme au sein de l’Union Européenne.

Si un dispositif de coopération préexistait en 2015 – renforcé par la nécessité évidente de combattre le terrorisme – du fait de la décision 2005/671/JAI du Conseil de l’UE du 20 septembre 2005 relative à l’échange d’informations et à la coopération concernant les infractions terroristes les requérants ne démontrent pas une violation constitutive d’une faute de la part des services de renseignement français, qui serait à l’origine des attentats.

Cette faute consisterait en une omission de répercuter, sous forme d’action stratégique sur le terrain, une information provenant de leurs homologues européens.

D’autres faits sont indépendants des services français ; le juge considère qu’il n’est pas prouvé qu’ils en auraient été informés.

La décision de première instance rejette donc intégralement les demandes des requérants.

Cette décision est une blessure de plus pour les victimes et leurs familles.

Le rejet de la responsabilité de l’État entraine le rejet des indemnisations sollicitées.

Toutefois, ces indemnisations s’ajoutent à celles que les victimes peuvent obtenir devant le FGTI.

Ceci étant dit, les relations victimes/FGTI semblent compliquées.

En effet, à ce jour, peu de dossiers de victimes ont été intégralement traités et donc indemnisés.

Le combat continue pour les victimes en vue de leur reconstruction et pour leurs avocats concernant leur indemnisation.

Bcv Lex se tient, comme à l’accoutumée, aux côtés des victimes.