Effondrement du pont Morandi à Gênes : devant quelle juridiction agir ?

Le 14 août, un effondrement d’une portion du viaduc Morandi de Gênes s’est produit.

Lors de la catastrophe, les conditions météorologiques étaient très mauvaises.

Des vidéos de la catastrophe sont disponibles ; elles sont impressionnantes.

Des préoccupations sérieuses se sont portés sur les ouvrages du même architecte.

Les responsabilités restent à déterminer.

L’enquête nécessitera des expertises techniques aux fins de les déterminer, toutefois, une longue procédure judiciaire est à prévoir.

La catastrophe et l’émoi national que celle-ci a provoqué ont conduit à une crise politique au sein du gouvernement italien.

Effondrement : un lourd bilan humain

L’effondrement a provoqué le décès de 43 personnes et de nombreux blessés.

Il s’agissait d’automobilistes circulant sur le viaduc mais également de personnes se trouvant sous le pont.

Parmi ceux-ci, 4 français ont perdu la vie.

Le Parquet de Paris a ouvert, le 15 août 2018, une enquête pour « blessures involontaires et homicides involontaires ».

L’enquête a été confiée à la Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN).

En vertu de l’article 113-7 du code pénal, la loi pénale française est applicable à tout délit commis par un étranger hors du territoire français lorsque la victime est de nationalité française au moment de l’infraction.

Dans un tel cas, et en vertu de l’article 689 du code de procédure pénale, les auteurs ou complices des homicides involontaires peuvent être poursuivis et jugés par les juridictions françaises. Ils encourraient jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75.000 € d’amende (article 221-6  du code pénal).

Selon l’article 693 du même code, le TGI de Paris est territorialement compétent quel que soit le domicile des victimes et/ou ayants droit.

Cela ne porte évidemment pas préjudice à la compétence juridictionnelle pénale italienne.

Toutefois, en France, la poursuite du délit ne peut être exercée qu’à la requête du Ministère Public, et sur plainte préalable des ayants droit de la victime (article 113-8 du code pénal).

Cette nouvelle catastrophe collective doit conduire à des condamnations civiles et/ ou pénales.

Les droits des ayants droit

Les proches et ayants droit des 4 victimes françaises ont indiscutablement subi un (des) dommage(s) du fait du décès de leur(s) proche(s) dans la catastrophe.

Dans un premier temps, les responsabilités, civiles, et le cas échéant pénales, doivent être établies.

Ensuite, les ayant droits devront être indemnisés par les responsables et leurs assureurs.

Juridiction civile compétente et loi applicable

Les ayant droits doivent être informés sur la juridiction compétente et de la loi appliquée.

Dans le cas où les ayants droit des 4 victimes françaises engageraient une action purement civile (c’est-à-dire sans préjudice de tout procès pénal en France ou en Italie et aux seules fins d’indemnisation), cette action devra être menée devant les juridictions italiennes, en application du droit européen (article 2 § 1 du Règlement (CE) du Conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000).

Le droit applicable serait  la loi italienne comme étant celle s’appliquant à une obligation non contractuelle résultant d’un fait dommageable. Cette règle est donnée par le Règlement Européen n° 864/2007 l du 11 juillet 2007, dit « Rome II ».

Concrètement, le régime de responsabilité italien et les quantum d’indemnisation s’appliqueront aux ayant droits français.

Ils doivent donc se rapprocher d’Avocats maitrisant le droit européen.

Les potentiels responsables

Parmi les entités dont la responsabilité pourrait être recherchée, se trouvent Autostrade SpA, constructeur du Pont Morandi et la Società Italiana per Condotte d’Acqua SpA, toutes deux domicilées à Rome.

La juridiction romaine pourrait en conséquence être saisie d’actions indemnitaires en Italie.

Elle appliquerait la loi italienne aux questions de responsabilité et de fixation des montants d’indemnisations.

Toutefois, en vertu de l’article 5, 4) du Règlement 44/2001 précité, toute personne domiciliée en Italie et dont la responsabilité du fait du drame du 14 août 2018 serait recherchée, pourrait être attraite devant la Juridiction correctionnelle française, si celle-ci venait à être saisie.

En effet, dans ce cas, la juridiction correctionnelle française pourrait connaître de l’action civile et statuer à ce titre sur les indemnisations en faveur des membres des familles et proches des 4 victimes françaises.

A cet effet, notre Cabinet travaille actuellement avec ses partenaires permanents en Italie, Me Marco Bona et Me Stefano Bertone, tous deux Avocats au Barreau de Turin, sur une analyse comparative de ce que pourrait être le traitement judiciaire cette catastrophe.

Nous nous tenons à la disposition des ayant droits pour toutes questions.