CJUE : retard de vol, exit la preuve de présence à l’enregistrement
C’est un soulagement ; la CJUE considère qu’en cas de retard de plus de 3h, les passagers n’ont pas à prouver leur présence à l’enregistrement ; une réservation confirmée suffit.
Par une ordonnance du 24 octobre 2019, elle vient contredire une jurisprudence française, éminemment défavorable aux passagers aériens.
Un précédent français très sévère envers les passagers
Nous déplorions ce précédent ici.
En effet, la jurisprudence du 14 février 2018 confirmée par celle du 12 septembre 2018 puis de nouveau celle du 10 octobre 2019, venait exiger la carte d’embarquement des passagers retardés pour leur accorder une indemnisation.
Cette preuve de leur présence à bord se heurtait à la disparition desdits documents, électroniques ou papiers à la suite du vol.
Ces décisions étaient évidemment très défavorables aux passagers.
A rebours total de ces arrêts, la CJUE adresse un véritable camouflet à la Cour de cassation et son exigence inique de la carte d’embarquement obtenue lors de l’enregistrement pour prouver sa présence à bord.
La CJUE se veut plus nettement plus souple et protectrice des passagers ; elle estime qu’en cas de réservation confirmée, ils doivent être indemnisés.
Les circonstances de l’affaire
Dans le cadre d’un vol EasyJet Venise-CDG arrivé avec plus de 3h de retard, la compagnie aérienne s’était refusée à indemniser deux passagers sur le fondement du règlement 261/2004.
Le motif en était que les passagers ne faisaient pas la preuve qu’ils se trouvaient à bord du vol retardé.
Ainsi, tout en étant en possession du listing des passagers à l’enregistrement, la compagnie indiquait que la réservation électronique était insuffisante à faire la preuve de leur présence ; elle sollicitait la carte d’embarquement – dans le droit fil de la jurisprudence française du 14 février 2018.
Saisi de la demande contre Easyjet, le tribunal en charge du contentieux aérien de CDG a formulé une question préjudicielle le 28 novembre 2018.
Un heureux revirement
Moins d’un an après, par ordonnance du 24 octobre 2019, la CJUE met un arrêt à cette exigence déloyale.
En effet, l’asymétrie de la disponibilité des documents est éminemment défavorable aux passagers ; les cartes papiers se perdent et celles électroniques disparaissent après le vol…
Non seulement, la Cour vient à la rescousse des passagers mais elle le fait de surcroit avec célérité et panache en statuant par voie d’ordonnance motivée, la question ne laissant “place à aucun doute raisonnable”.
La Cour qualifie l’exigence de la production de la carte d’embarquement comme une “une exigence inadaptée à leur situation [de] devoir prouver ultérieurement […] qu’ils étaient présents à l’enregistrement du vol retardé”.
Toutefois, la Cour laisse une porte ouverte au transporteur ; la possibilité pour lui de prouver que les passagers n’ont pas été transportés sur le vol retardé en cause.
On peut se réjouir que la CJUE réoriente la charge de la preuve vers un standard à la portée des passagers.