Le contraceptif définitif intra-utérin Essure questionné

Bayer, Science for a better life : un slogan qui ne tiendrait pas ses promesses ?

BCVLex, en partenariat avec Global Justice Network (GJN) examine le dossier ESSURE, ce dispositif contraceptif définitif intra utérin, prenant l’apparence d’un petit ressort, placé à l’entrée des trompes de Fallope, dans le but de créer une réaction inflammatoire nommée fibrose destinée à obstruer complètement et définitivement les trompes.

De nombreuses femmes américaines ayant opté pour une telle contraception s’élèvent aujourd’hui pour en dénoncer les effets indésirables.

A la suite de la constitution d’un groupe d’experts auprès de la FDA américaine (Food and Drugs Administration) en vue de l’analyse de données clinique déjà recueillies, l’institution américaine a publié en mars 2016 un projet de guide d’information soumis à consultation publique. La FDA recommande également une information plus précise des patientes. Parallèlement, il a ordonné à Bayer de mener une veille sanitaire dans le but d’obtenir plus de données sur le rapport bénéfices / risques à attribuer au dispositif ESSURE. La FDA réserve donc ses conclusions pour l’instant.

En France, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) est également saisie du dossier. Dans un communiqué du 27 avril 2016, celle-ci informe qu’elle « n’a pas identifié d’élément remettant en cause de la rapport bénéfice / risque de ce dispositif ». Toutefois, par précaution, elle « souhaite rappeler aux patientes les modalités de pose de cet implant ainsi que les risques éventuels liés à cette technique ». Elle évoque des « risques et effets indésirables » tels que des « douleurs pelviennes et des saignements » signalés lors de la pose ainsi que des « douleurs persistantes et des saignements » après l’intervention. L’ANSM relève également des « grossesses et notamment des grossesses intra-utérines ainsi que des réactions d’hypersensibilité » auxquelles s’ajoutent de « rares cas de migration du dispositif […] avec un risque de perforation des trompes de Fallope ou de l’utérus pouvant nécessiter une ré-intervention chirurgicale afin d’enlever le dispositif ». Rien de vraiment rassurant.

C’est d’ailleurs sur ce dernier point que des chercheurs du Weill Medical College de l’Université de Cornell se sont penchés, considérant un échantillon de plus de 52.000 femmes stérilisées dans l’Etat de New York depuis 2005. Dans l’article publié dans le Bristish Medical Journal, ils comparent la sécurité et l’efficacité des stérilisations par hystéroscopie (intervention pratiquée sous anesthésie locale, consistant en le placement du dispositif dans l’utérus via une mini caméra) et par laparoscopie (intervention chirurgicale plus invasive, sous anesthésie générale, via une incision dans l’abdomen visant à obstruer les trompes par des bagues, colliers ou bandelettes, procédure nommée « ligature des trompes »).

Les conclusions de leur étude sont les suivantes : les femmes stérilisées par hysteroscopie ont un risque 10 fois plus élevé que celles stérilisées par laparoscopie, de devoir de nouveau subir une intervention dans l’année suivant la stérilisation ; ce risque est 8 fois et 6 fois plus élevé pour ces mêmes patientes à de 2 et 3 ans de l’opération. Les auteurs définissaient ces résultats comme présentant « une sérieuse menace pour la sécurité » (« serious safety concern »).

Les scientifiques en concluent que les risques et bénéfices des deux procédures devaient être évoquées avec les patientes dans le but que celles-ci soient pleinement éclairées à l’heure de choisir la méthode de stérilisation.

Quoiqu’il en soit, les effets indésirables rapportés par les patientes sont bien au-delà des réserves émises par le communiqué du Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français (CNGOF) en réaction à l’arrêté du 5 février 2016 imitant la pratique de l’acte de pose de dispositifs pour stérilisation tubaire par voie hystéroscopique à certains établissements de santé en application des dispositions de l’article L. 1151-1 du code de la santé publique.

Par la voix de son président, l’organisation professionnelle fustige ladite limitation à certains établissements sans concertation, conduisant au « retour en arrière », à des techniques « plus invasives » dont l’abrogation a été réclamée. Il justifie un nombre de complications supérieur du à la « généralisation de la technique » et indique qu’ « il ne serait pas justifié de se laisser envahir par des craintes excessives et de bannir cette technique de stérilisation tubaire moins invasive ». Il conclue que « la balance bénéfices/risques comparative ne serait peut-être pas au détriment de la technique Essure, à condition bien entendu qu’elle soit appliquée convenablement ».

Toutefois, il est à noter qu’un certain nombre d’effets indésirables et complications dont les effets sont parfois invalidants, sont déplorés par un nombre important de patientes et que ce chiffre est à mettre en regard avec le nombre de patiente ayant subi la stérilisation par hystéroscopie, permettant de prendre en compte l’ampleur du phénomène et éventuellement à l’avenir, à remettre en question le rapport bénéfice / risque. Des expertises médicales sont à envisager pour les nombreuses patientes souffrant d’effet indésirables.

BCVLex se tient à l’écoute des suites de ce dossier et ne manquera pas de vous tenir informés de son évolution.